Le portrait de Pascal Chollet 

fma: Bonjour Pascal.

Pascal: Ah, que coucou !

 

 



fma: Ton premier souvenir avec les minéraux ?

Pascal: Il y en a plusieurs..... un bloc de quartz avec quelques pointes hyalines ramené par mon père - alpiniste – d'une de ses varappes avant que je ne soit né, et qui - tout petit - me plaisait beaucoup. Egalement, une pierre blanche posée sur le buffet de ma grand-mère, qu'elle avait ramassée quand elle était gamine... (elle est née en 1905 à Ste-Marie-aux-mines, dans le hameau de St-Pierre sur l'Hâte, au dessus du Rauenthal). C'etait une calcite en cristaux pseudo-hexagonaux, qui trône aujourd'hui dans ma vitrine – mon héritage le plus précieux. Et puis, plus concrètement, un gars qui vendait des minéraux le dimanche au marché aux puces de mon village. C'est véritablement lui qui a été le déclencheur de ma passion.... c'était en 1982, j'avais 12ans.

 

 



fma: Te souviens-tu du moment précis de la naissance de ta passion ?

Pascal: Zut ! Je me suis lâché au dessus et j'ai répondu à ta question avant que tu ne la poses...

 

 



fma: une personne se cache t'elle derrière cette révélation ?

Pascal: Ben, encore une réponse anticipée... Il s'appelle Noël Havet, et il est d'ailleurs auvergnat.... Clermontois né à Riom. A noter qu'il est l'antithèse du cliché que l'on se fait de l'auvergnat : je n'ai que trop peu rencontré de personnes aussi généreuses que lui !

 

 



fma: Quelle image avais-tu plus jeune de la minéralogie ?

Pascal: c'est une question que j'ai du mal à appréhender : ma passion est née alors que j'étais plutôt jeune... Alors avant la naissance de ma passion, j'étais (forcément) encore plus jeune et je ne savais tout simplement pas que ça existait...

 

 



fma: Le plus important pour toi? C’est quoi ?

Pascal: Il y a beaucoup de choses importantes.... Mais pour moi, l'aspect scientifique prime. Je sacrifierait sans remord (bien que à contre-cœur quand-même) un échantillon unique d'un truc inconnu si une analyse destructive s’avérait nécessaire

 

 



fma: Tu ressens quoi quand tu pars sur le terrain?, quand tu te trouves enfin face à la pièce tant convoitée ?

Pascal: C'est une question qui appelle de multiples réponses..... Quand j'étais gamin, une excitation intense.... dur de trouver le sommeil la veille, et quand enfin il arrivait, je faisais systématiquement le même rêve : Je rentrais sous un glacier (va savoir pourquoi?), dans une caverne creusée par les eaux de fonte, et là je découvrais des plaques immenses d'améthyste et de citrine, toutes propres et bien exposées, comme à « Minérama »

• Aujourd'hui, soit je pars sur un site que je connais bien et j'y vais un peu comme un « dilettante » sans l'intention de ramener grand chose, mais quand-même avec l'espoir de mettre la main sur le truc pas ordinaire (Il faut préciser que - en microminéralogie – sauf exception on ne sait pas si on a trouvé de l'exceptionnelou pas : les découvertes se concrétisent à la maison, sous la binoculaire).

• Soit je pars sur un site nouveau, et là je me documente – si possible – longtemps à l'avance puis j'essaye d'oublier pour avoir un regard « neuf » et avoir quelques repères sans pour autant forcément retomber là où tout le monde s’acharne depuis trop longtemps.

Quant-à trouver la pièce tant convoitée..... ça arrive trop rarement ! (sinon, ce ne serait pas drôle...) J'ai souvenir du jour où j'ai mis la main sur la churchite-(Y) aux Montmins.... 10 ans que j'y allais sans la trouver. D'abord j'ai failli ne pas la voir..... passer à coté (j'ai fait pareil avec la leucophosphite : j'ai repris ma poubelle pour être sur de n'en avoir pas jeté par méprise). Puis un grand « Whaou » derrière la binoculaire ! Et comme le bloc était fourni, j'ai rempli plein de petites boites et j'en ai fait profiter les copains... c'est l'avantage de la microminéralogie : quand on trouve, c'est rarement une seule pièce !

 

fma: Si je te dis que, en fin de compte, ce n'est que des cailloux, il y a peut-être mieux à faire. Tu en penses quoi ?

Pascal: Chacun son kif ! Mes parents sont des collectionneurs férus de faïences anciennes, qui me laissent de marbre ! (et malheureusement pas de Carrare....) Heureusement qu'on a pas tous les mêmes goûts : on se ferait chier, à prêcher des convertis, et on se marcherait dessus à 200.000 pélos entassés dans les stades de foot (quoi, c'est déjà le cas???)

 

 



fma: L'endroit où tu aimes aller pour te ressourcer c'est où?  Pourquoi cet  endroit ?

Pascal: Le lac d'Allos ! J'y n'y vais que trop rarement, mais ça me colle des frissons à chaque fois ! Quant-à savoir pourquoi, il suffit de taper « lac d'Allos » dans google, et de cliquer sur « images », vous comprendrez..... Ajoutez à ce site féerique des souvenirs d'enfance, et la magie opérera à coup sur !

 

 



fma: Préféres-tu prospecter seul ou avec d'autre personne?  Pourquoi ce choix ?

Pascal: En groupe ! La minéralogie est une passion, et une passion ça se partage forcément ! Et puis en groupe, quand on trouve on s'éclate, et quand on ne trouve pas, on passe le temps en rigolant.. En plus, avec le temps, j'ai trouvé une raison plus pragmatique : je ne me suis jamais senti aussi bien que sous terre – au fond d'une galerie de mine, et pour élargir mon « champ des possibles » j'ai appris à évoluer sur corde. Et en spéléo, partir seul c'est de l'inconscience !

 

 

 



fma: Le minéral dont tu es le plus fièr ?  Racontes nous son histoire.

Pascal: 22 août 1987 ! on était allé à Cap-Garonne (ma mine fétiche – dans le var) avec Arrigo Santi. Un « senior » qui m'a traîné derrière lui bien des fois quand j'étais ado. En 1987 c'était déjà interdit d'accès.... Mais depuis, il y a prescription. J'étais en train de taper dans la zone à cyanotrichite de la grande salle quand il est venu me trouver : ça t’intéresse, de la belle carminite ? Il avait dans ses mains des pièces assez conséquentes. Le l'ai suivi, on a tapé, et ouvert une fissure qui a livré deux très grandes plaques. (La plus petite rentrait avec peine dans un bac de glace d'un litre!) malheureusement la qualité était très médiocre. Par contre le vis-à-vis - beaucoup plus dur à travailler, est venu en morceaux beaucoup plus petits.... mais la qualité des cristallisations - superbe! Le plus gros placage mesure 8 x 4,5cm, et malgré quelques contacts, c'est une pièce de très bon niveau national, voire plus... J'ai été sollicité plusieurs fois par divers acheteurs, mais « no way ». Elle restera chez moi, puis finira un jour au musée de la mine de Cap-Garonne (je ne sais pas quand, et je ne suis pas spécialement pressé ^^)

 

 

 



fma: Donnes-moi le nom d'un professionnel, cristallier et/ou amateur averti que tu admires.

 
Pascal: « Professionnel », pour moi ça ne signifie pas grand chose.... J'ai croisé des « pros » qui ne connaissaient pas grand-chose en minéralo, et des amateurs qui en savaient bien plus que certains scientifiques.... J'aurais pourtant un grand « coup de chapeau » à tirer à MONSIEUR Jacques-E. Dietrich  ! : Sommité de la minéralogie française, inventeur de l'agardite-(Y) (de l'agardite tout court en fait , car à l'époque on n'avait pas encore détecté ses différentes déclinaisons). C'était un personnage délicieux, affable et humble. En dépit de ses «états de service » longs comme le bras, il ne se prenait jamais au sérieux. Et malgré notre différence d'âge et d'érudition, il m'a immédiatement proposé le tutoiement, et – avec le recul – j'ai remarqué que ce qu'il racontait le plus volontiers de ses multiples aventures, ce n'était pas ses (nombreuses) réussites, mais plutôt ses ratages !

Je pense souvent à lui, et il me manque.

 

 



fma: Tu as le droit à 3 photos qui reflètent notre passion, lesquelles tu as choisies ?

 

J'en ai choisi 4 – désolé !

Féérie :